Laïques de tous les pays, unissez-vous !

Une laïcité française souvent mal comprise ou caricaturée, mais aussi utilisée par ceux qui veulent en faire un instrument d’affrontements communautaires, est manipulée par des adversaires irréductibles qui cherchent à la dénaturer, sous prétexte d’ouverture ou d’évolution.

Par Marc Lefèvre, porte parole et membre fondateur du mouvement La paix maintenant, représentant du collectif Deux peuples, deux états, chalom akhshav

La société française est globalement inquiète de son avenir. Ebranlée par un fanatisme religieux générateur de massacres, déstabilisée par des revendications communautaires souvent véhémentes, et par des crispations identitaires en retour, menacée par de multiples phénomènes d’impatience et d’intolérance avec, en arrière-plan, une situation économique non maîtrisée, elle est en recherche de cohésion et de sécurité. C’est dans ce contexte multiforme que les débats renouvelés sur la laïcité surviennent.

Une laïcité française souvent mal comprise ou caricaturée, mais aussi utilisée par ceux qui veulent en faire un instrument d’affrontements communautaires, est manipulée par des adversaires irréductibles qui cherchent à la dénaturer, sous prétexte d’ouverture ou d’évolution.

Des mises au point sont donc nécessaires pour expliquer et rassurer, et faire la démonstration que la laïcité est le principe autour duquel s'articule une conception républicaine de la citoyenneté et de l’organisation d’un État, qui garantisse à chacun les conditions de son évolution et de son épanouissement.

Contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire, la laïcité n’a pas pour vertu d’interdire mais au contraire de permettre. De permettre quoi ? De permettre la liberté de choisir sa voie et son identité en pleine liberté, et hors de pressions ou contraintes liées à ses origines ou sa naissance. Comment ? Tout d’abord en garantissant la stricte neutralité de l’espace public. Car la laïcité n’est pas une opinion ou une valeur. C’est d’abord et avant tout un principe d’organisation sociale et politique.

La neutralité de l’espace public, c’est-à-dire de l’ensemble des institutions étatiques et publiques au service de tous les citoyens (écoles, hôpitaux, services administratifs, police, armée, etc..), cela veut dire que ces institutions sont affranchies de toute tutelle dogmatique et religieuse, et sont dévolues à l’ensemble du peuple sur une stricte base d’égalité.

La laïcité n’est pas contre les religions ou les croyances personnelles quelles qu’elles soient. Mais elle les réserve à la sphère privée. Car l’espace public tel que définit plus haut, est réservé à ce qui est commun à tous les hommes et toutes les femmes, pour les rassembler plutôt que les diviser.

La fameuse séparation des Eglises et de l’Etat n’est donc pas un but, mais seulement un moyen pour s’assurer de la stricte indépendance des pouvoirs publics par rapport à toute tutelle religieuse et dogmatique, et par là même d’un traitement égal pour tous.

Cette mise à l’écart de tous les dogmes dans l’espace public, constitue un apprentissage pratique de la liberté. Ce qui pourrait apparaître à première vue comme un interdit, protège en fait l’individu contre toute influence voire contrainte, religieuse ou non, et contre tout déterminisme ou prédestination en fonction de ses origines.

C’est dans cet esprit qu’a été mise en place par exemple, la loi de 2004 interdisant les signes religieux ostentatoires à l’école publique. L’École est un espace de formation libre, ou chacun doit pouvoir développer son esprit critique par l’apprentissage de connaissances, et être ainsi capable de choisir sa voie et son identité, voire ses identités multiples, indépendamment de tout déterminisme lié à ses origines ou à sa provenance.

Les règles de la laïcité sont là pour élargir le champ des possibles de chaque individu. La défense exigeante de la liberté de pensée, le développement de la raison critique sont les garanties d’un meilleur exercice des libertés individuelles.

Garantir la neutralité de l’espace public, défendre la liberté de conscience, veiller à un traitement égal de tous par la puissance publique, lutter contre les régimes discriminatoires et les repliements communautaires, ce n’est pas porter atteinte aux libertés individuelles, c’est au contraire les renforcer. C’est garantir que l’intérêt général est la raison d’être exclusive de la loi commune.

La laïcité n’est donc pas une lutte d’une partie de la société française contre certains de ses éléments, bien au contraire. L’amélioration et l’accentuation de la mise en oeuvre de ses principes sont la garantie d’un traitement égal pour tous, de l’absence de discrimination et le moyen que notre République soit plus libre, plus fraternelle et plus solidaire.

Il ne s’agit pas d’un vague « Vivre ensemble », il s’agit de créer et défendre les conditions pour que chacun soit libre de choisir sa voie et de s’épanouir dans une société plus juste et tolérante, donc plus confiante en elle-même et son avenir.

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