Panama Papers contre paparazzi

Encore au conditionnel est une chronique hebdomadaire à prendre au conditionnel.

Depuis cinq jours, des dizaines de journaux du monde entier − fleurons de la presse dite sérieuse − dévoilent l’intimité financière des célébrités. Et par la même occasion, celle de quelques riches ronchons qui cultivaient la discrétion en plus de l’escamotage fiscal. Pour ces derniers, les conséquences sont encore difficiles à estimer. Mais en ce qui concerne les célébrités, il y aurait déjà une victime innocente : la presse à scandale.

Ces journaux multicolores appelés presse du cœur ou sentimentale ou people risquent de disparaître. C’est du moins le pronostic d’Umberto di Andrea, quadragénaire à bonne mine que le milieu des paparazzi connait mieux sous le sobriquet de Toto les nichons – une évocation peu subtile de ses portraits de princesses d’Europe et de Hollywood prises au dépourvu. Toto les nichons ne se détourne plus de son mobile qui sonne toutes les deux minutes les noms des personnalités impliquées dans les révélations des Panama papers. Des vies qui jusqu’à présent s’étalaient plus volontiers dans « Gala » ou « Voici » que dans « Süddeutsche Zeitung ».

Comment intéresser désormais le public avec un reportage sur les vacances à Saint-Tropez d’un acteur, d’un chef d’Etat si une certaine presse révèle tous les détails scabreux derrière la mise en scène ? Rien ne nous est plus épargné : le prix de la villa de vingt-deux pièces avec piscine, le nom de la société bidon qui la possède, l’origine frauduleuse des fonds.

« C’est l’actualité heureuse qu’on assassine ! », s’emporte Umberto. « Et puis qu’est-ce que ça peut faire ? Il faut bien qu’il y ait des gens dans les palaces. » Toto les nichons s’en moque pas mal de savoir qui se cache derrière Fair Exchange Ltd domiciliée aux Bahamas ou Rainforest Preservation Ltd, sise à Panama Ciudad. « De toute façon, personne n’y comprend rien, pas même les riches. La plupart se contentent de dépenser, je les vois d’assez près pour le savoir. »

Umberto fait signe au barman de remettre ça et tente de s’expliquer le désastre : « C’est une guerre de la presse, les journaux chiants veulent la peau des magazines amusants. Ils nous dézinguent nos sujets. Comment on va faire cet été pour vendre du people en maillots de bain ? » La thèse de Toto est troublante. « Cette presse ne connaît pas de limites. L’argent, c’est un sujet intime, on ne déballe pas la vie financière des autres comme ça, c’est une question de respect. »

Des idées de vengeance lui viennent déjà : vendre des images de Pigasse sous la douche ou de Niel dans des poses immodestes. Mais qui en voudrait de ces clichés d’horreur, se demande-t-il ?

Son mobile vrombit. Quoi encore ? Johnny possèderait-il secrètement les établissements Henri de Borniol sous le faux-nez de la Belgian Crook Ltd ? Non, c’est le mari d’une ministre qui passe la nuit debout et à moitié nu à République. « Plutôt changer de métier que de couvrir ça », tranche Umberto. « Je vais te dire, écoute-moi bien, un jour on regrettera. On parlera de ce temps-là avec nostalgie, quand des stars, des chefs d’Etat et des bailleurs de fond de l’Etat islamique avaient des bas de laine du même tricot. On se dira, quand même, quelle époque de liberté c’était ! »

Toto les nichons est bien pessimiste.

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