"Daech pratique une acupuncture de combat qui tétanise tel un trait au curare tiré par une sarbacane, analyse Emmanuel Loi (écrivain)."
Le principe
Un aéronef est fait pour voler. La conduite dans les airs demande de ne pas être percuté ni intercepté violemment. Le plan de vol ne comprend pas l'incident majeur qui est l'obstruction de la compréhension. Plus question de déroute ou d'aquaplaning sur une banquise, la masse de plus de sept cent tonnes propulsée à mille km/h représente dix locomotives de l'Union Express se ruant à toute vitesse dans le vide. L'hypothèse de pouvoir s'en tirer est quasi nulle. S'en prendre donc aux aéronefs, soit comme projectiles et boulets de canon soit objet lui-même à détruire, tels que l'attentat des Twin Towers de 2001 ou en Égypte, dans le Sinaï, est habile et cohérent.
La stratégie
« Il n'y a que la foi qui sauve », cet adage est celui du climatiseur par lequel est diffusé le gaz de sarin. Le choix du désert le plus mythologiquement majoré est délibéré. Un vol de nuit d'un troupeau de vacanciers, la mise est proportionnelle à l'enjeu : il n'y a plus de cartographie possible du loisir ou de la paix assurée. Plus besoin de moyens de destruction massive. Un uppercut sous le menton et la modération quant à la riposte est clivée. Daech pratique une acupuncture de combat qui tétanise tel un trait au curare tiré par une sarbacane, les centres névralgiques de réaction sont annihilés.
La cible
Le tourisme de masse touche quasiment presque tous les secteurs de la population mondiale et plus un seul peuple-nation ne peut s'offrir un bridge de plomb pour une mastication d'enfer. Il se déverse sur des côtes désignées en Thaïlande, en Crête et ailleurs, des tombereaux de chalands appâtés par une assimilation de la geste de plaisir pour tous. En tant que pions d'un esclavagisme consentant, ils n'ont rien à redire quant à la malfaçon ; le manque d'originalité de ces voyages-charters assure leur reproduction. C'est de tout repos en dépit des heures improbables d'arrivée et de départ, les escales et les aéroports à quarante bornes des dessertes. Cela est huilé et fonctionne. Mais voyager en paix n'existe plus. Dans le RER, à partir de 23h, les voyageurs sont regroupés dans un ou deux wagons, et les lignes éclairées vides sillonnent les banlieues de Hambourg et Paris.
L'enjeu
Vu qu'il n'y a plus d'aventuriers, l'insécurité peut être vendue en tant que piment qui peut être fatal. Que ce soit un trajet quotidien pour aller à l'école ou faire ses courses, cela peut se transformer en odyssée. Alors, qu'un bagagiste introduise une bombe dans un zinc et qu'un aéronef pète en plein ciel au milieu de la nuit nous interroge sur la vocation de l'Égypte à recevoir des gens qui ne vont même pas voir les pyramides. Le point de jonction entre un maréchal chef d'état-major et un policier orphelin, outre leur théocratie d'un leadership sans partage, serait peut-être la clause d'un contrat entre deux puissances dévastées. Le délit d'opinion, le droit de l'opposition, sont si forclos dans ces contrées que la camisole démagogique affole l'aiguille des consoles d'orientation. Les deux potentats affrontent un ennemi furtif, une hydre de synthèse qu'ils ont hébergée et élevée au biberon des micro-républiques satellisées de l'empire russe et de l'atomisation des Frères musulmans au Caire.
L'objectif
Le retour à l'envoyeur, féroce et efficace, confirme la volonté d'une barbarie adaptative et la confirmation de la stratégie de Mao par le Califat : mailler une toile où ses propres forces attaquent et corrodent les défenses et démunir le réflexe de contre-offensive.