La dynamite n'a pas apporté à l'humanité que des destructions, puisque le legs d'Alfred Nobel finance encore aujourd'hui son vœu de récompenser des personnes ayant apporté le plus grand bénéfice à l'humanité. Ou, dans le cas du prix de la Banque de Suède en sciences économiques, fondé en sa mémoire en 1968, des économistes comme Angus Deaton, distingué par le jury de la Fondation Nobel lundi 12 octobre 2015.
Mais pour le testament d'Alfred Nobel, l'économie ne faisait pas partie des disciplines en mesure d'aider l'humanité. Était-ce dû à l'ambiguïté de sa définition, science de l’allocation optimale des ressources rares ? Ou à la difficulté pour la discipline de cerner son objet, l'état du monde considéré sous un rapport purement économique.
Pour Angus Deaton, la compréhension des impacts de l'économie est d'abord liée aux données empiriques recueillies sur le terrain. Seuls, les modèles économétriques restent silencieux et ne mettent à jour aucune relation entre les faits. Après George Orwell, l'économiste a redécouvert que voir ce qui se passe sous nos yeux nécessite une lutte permanente.
Car l'essentiel des travaux de l'auteur de l'ouvrage, The Great Escape: Health, Wealth, and the Origins of Inequality, qui pointe les écarts de richesse au sein des pays et entre les pays, aggravant les risques d'instabilité sociale et politique, s'appuie sur l'analyse d'informations collectées à la source, l'unique lieu légitime pour rendre compte de la réalité : la vie quotidienne de tout un chacun.
C'est pourquoi, malgré les contestations sur la valeur d'un Nobel de l'économie, discipline oubliée par l'inventeur de la dynamite, il est des explosions dont l'onde de choc n'a pas fini pas de se propager.