Un républicain : "avec la démocratie, on ne doit pas faire semblant"

Entretien avec Samia Soultani-Vigneron, membre des républicains, 1ère adjointe au Maire de Laval.

« Les jeunes rejettent souvent en bloc les décisions des élus qui, parfois, ont tendance à les prendre seuls. »

Vous êtes 1ère adjointe au maire de Laval en charge de la démocratie locale. Pourquoi occuper une fonction aussi peu usuelle quand on est numéro 2 d’une ville aussi importante ?

C’est un choix tout à fait personnel qui me tenait à cœur depuis longtemps. C’est pourquoi, dès notre élection aux municipales de 2014, j’avais demandé au maire, François Zocchetto, de prendre en charge cette activité. Et il avait accepté. Cela dit, je suis également responsable de l’emploi et du développement économique. En fait, j’étais partie d’un constat. Lorsque j’étais dans l’opposition, j’avais été, bien que de droite, favorable à l’instauration de la participation citoyenne lancée par Ségolène Royal. Néanmoins, je voyais bien que la majorité d’alors, qui avait institué un comité des sages et des conseillers de quartier, n’avait pas la volonté politique de la faire vivre dans la pratique. Or, avec la démocratie, on ne doit pas faire semblant. D’où ma volonté de démultiplier le dispositif théoriquement existant pour permettre aux citoyens, en particulier aux jeunes, de s’exprimer. Je suis d’autant plus sensible à cette question que, marocaine d’origine, je n’ai acquis la nationalité française qu’en 2004.

Les jeunes sont-ils donc votre cible privilégiée ?

Je constate que les jeunes rejettent souvent en bloc les décisions des élus qui, parfois, ont tendance à les prendre seuls. Aussi, quand je les rencontre, je leur dis : « Au lieu de les subir, prenez-vous en main et investissez-vous dans un projet collectif ». D’où l’idée de créer les Ateliers de la Cité. C’était un pari. Et, dès sa première année, il a très bien réussi.

Que sont donc ces Ateliers de la Cité ?

Les Ateliers de la Cité sont un des dispositifs de participation citoyenne que nous avons mis en place. L’idée directrice est que les citoyens travaillent ensemble sur des projets dont ils ont eu l’initiative. La première édition s’est déroulée en trois temps, de l’automne 2014 à mai 2015 : d’abord, dans chaque maison de quartier et en présence d’élus référents, une présentation des projets de la municipalité ; ensuite, l’appel à candidatures pour des projets collaboratifs et leur suivi à travers des réunions de groupes de travail co-animés par ces élus et les responsables des maisons de quartier ; enfin, la venue de chefs d’entreprise pour échanger avec les jeunes sur les opportunités d’emploi. Ce dernier point est d’autant plus important que, dans les quartiers populaires, les jeunes ne disposent pas de réseaux. Je peux donc leur faire profiter des miens et faciliter ainsi les rencontres.

Quels projets ont particulièrement retenu votre attention ?

Les projets issus de ces Ateliers ont été présentés en mai au cours d’une cérémonie commune et ils se sont vus attribuer des prix. Ainsi, le prix Coup de coeur a été décerné au projet d’installation d’un parc de fitness en plein air dans un quartier prioritaire de la ville. Coûtant 30 000 euros, son financement ne peut être assuré que partiellement
par la mairie qui va, par exemple, installer le matériel. Pour trouver des fonds complémentaires, les promoteurs du projet se sont pris en main pour en demander à la Caisse d’allocations familiales et à l’Agence régionale de la santé. En outre, profitant de mon réseau d’entreprises, ils ont déjà obtenu 10 000 euros de l’une d’entre elles et poursuivent leur prospection.

Parmi les autres projets, je pourrais citer celui de créer un bar associatif. Géré par des bénévoles, il permettrait aux passants de partager un moment avec eux. Ou encore, cet atelier de bricolage qui serait un moyen d’entraide entre voisins. Un lieu a déjà été trouvé et, pour son financement, les bailleurs sociaux se sont impliqués.

Vous avez dit que les Ateliers de la Cité étaient un de vos dispositifs de démocratie locale. Quels sont les autres ?

Le deuxième s’intitule les Jeudis citoyens. Précédant les conseils municipaux, ils permettent aux Lavallois de s’exprimer librement sur un certain nombre de sujets liés à l’action municipale et de se faire expliquer leur évolution. Les derniers traités concernent l’urbanisme, les finances et la mutualisation des services entre la ville et l’agglomération. Quant au troisième dispositif, il se traduit par la présence dans chaque quartier d’élus référents, 35 au total, que j’évoquais tout
à l’heure. Sur place, ils assurent tous les 15 jours une permanence destinée à régler les problèmes qui préoccupent les citoyens venus à leur rencontre.

Quel bilan tirez-vous de ces premières actions ?

En termes quantitatifs, d’abord, on peut dire que, dans l’ensemble des trois dispositifs, quelque 1 000 personnes sont intervenues, avec une prédilection pour les Jeudis citoyens puisque, entre 150 et 200 d’entre elles sont venues à ceux consacrés à l’urbanisme et une centaine à ceux qui traitaient des finances. Quant aux Ateliers, ils ont mobilisé une cinquantaine de citoyens.

Sur le plan qualitatif, on peut dire que le bilan est très positif. Ces dispositifs permettent en effet de commencer à établir des relations de confiance entre les élus et les citoyens dans la mesure où ceux-ci voient que leurs projets aboutissent. En outre, si 30 % des habitants impliqués cette première année étaient des seniors, je me félicite que beaucoup de jeunes des quartiers populaires aient été présents. Enfin, parmi mes projets, figure la mise en place d’un conseil des
jeunes, collégiens et lycéens, avec l’idée de récompenser les projets qu’ils auront élaborés.

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